Dimitri Rouchon-Borie

Editions Le Tripode / 2023 / 240 pages
Écoutez bien ce que je vais vous dire parce que dans l’instant c’est la nuit qui parle pas moi et c’est une voix pure, alors je serai pas capable de la refaire ensuite.
C’est l’histoire de Gio. Et du premier jour de reste de sa vie. Parce qu’il est un survivant, un guerrier avec une cicatrice qui le rappelle aux vivants, redécouvrant la vie sous un jour nouveau après être passé trop près de la quitter. De retour dans son clan, il ne veut plus de ses lois, de cette violence, et c’est avec Dolorès, jeune et sublime chrysalide, et le jeune Papillon aussi dur que fidèle, l’enfant sauvage au cœur tendre, qu’il veut emprunter le chemin d’une vie différente.
Guidé par les étoiles et l’esprit de la chouette qui lui rend visite depuis son agression, Gio, le géant tendre, prend soin de ses protégés à qui il souhaite si fort des lendemains apaisés, différents. Mais le monde est rempli de loups et les cœurs purs, les miraculés, y ont-ils réellement une place?
– On est du voyage.
– Du voyage pour aller quelque part ? Ou pour se faire oublier de votre chez vous ?
Parce qu’il aurait pas fait bon y rester ?
– Un voyage, c’est toujours un peu des deux.
La poésie de Dimitri Rouchon-Borie nous attrape le cœur à deux mains dans cette histoire de vie cabossée et sans une once d’indulgence. La dureté et la violence du récit est contrebalancée par les mots de Gio, si doux, qui, même s’il n’est pas le narrateur, habite tout le texte. L’auteur réussit à faire entrer de la lumière dans un roman absolument sombre. La puissance des personnages, fracassés par la vie, nous happe dès la première rencontre. Dolorès si vulnérable, Gio dont l’âme ne sais plus si elle habite encore ce corps ou si elle est en passe de le quitter, Papillon à la présence tellement intense et criant sa soif de vie alors qu’aucune ligne de dialogue ne lui est dédiée…
J’ai retrouvé la puissance poétique découverte avec 𝘓𝘦 𝘋𝘦́𝘮𝘰𝘯 𝘥𝘦 𝘭𝘢 𝘤𝘰𝘭𝘭𝘪𝘯𝘦 𝘢𝘶𝘹 𝘭𝘰𝘶𝘱𝘴 qui m’avait absolument bouleversée. Ce rapport aux mots et surtout au style que je n’ai trouvé nulle part ailleurs. Beaucoup d’émotions au cours de cette deuxième lecture de l’auteur, ce qui me conforte dans l’idée qu’il fait partie de ceux, rares, qui savent toucher les âmes avec des mots.
Il l’agrippe dans les yeux et laisse dire par les pupilles ce que la langue irait tremper de maladresse.
