« Arrête avec tes mensonges »

Philippe Besson

Editions 10-18 / 2018 / 160 pages

Quand j’étais enfant, ma mère ne cessait de me répéter : « Arrête avec tes mensonges. » J’inventais si bien les histoires, paraît-il, qu’elle ne savait plus démêler le vrai du faux. J’ai fini par en faire un métier, je suis devenu romancier. Aujourd’hui, voilà que j’obéis enfin à ma mère : je dis la vérité. Pour la première fois. Dans ce livre. Autant prévenir d’emblée : pas de règlement de comptes, pas de violence, pas de névrose familiale.

Mais un amour, quand même. Un amour immense et tenu secret. Qui a fini par me rattraper.

J’ai adoré découvrir la plume de Philippe Besson par ce livre qui se classe à part dans la liste de ses romans. Ce livre est une parenthèse, une immense déclaration d’amour, de reconnaissance à celui qui, avant tous les autres, avait lu en lui, lui offrant un épanouissement essentiel. L’auteur nous offre un pan de sa vie, lui qui a l’habitude d’inventer des histoires il va pour une fois dire la vérité d’une partie de la sienne. Pour la première fois.  

Écrit comme une confession, les souvenirs couchés sur le papier comme autant de désirs inachevés, le texte de Besson est emprunt d’une sensualité folle, d’une sexualité assumée – ou non – explorée avec l’adolescence des corps qu’on se découvre. L’écriture dégage une intensité dramatique rare qui nous absorbe totalement, le long de chacune des trois parties de ce récit extrêmement bien construit.

Il ajoute cette phrase, pour moi inoubliable : parce que tu partiras et que nous resterons.

Début des années 80, petit village français, et l’intimité d’une histoire de quelques mois, une histoire qui ne se dit pas, qui aura pourtant l’impact d’une vie. De deux vies. Puis le temps qui passe, les promesses qu’on ne trahit jamais, les années qui nous changent et font pâlir les émois les plus foudroyants, jusqu’à ce que le passé nous rattrape avec la vitesse d’un rideau qui tombe.  

Un magnifique récit autobiographique qui nous offre un angle de vue particulier sur l’auteur et qui, en ce qui me concerne, me donne très envie de découvrir son œuvre.  

Plus tard, j’écrirai sur le manque. Sur la privation insupportable de l’autre. Sur le dénuement provoqué par cette privation ; une pauvreté qui s’abat. J’écrirai sur la tristesse qui ronge, la folie qui menace. Cela deviendra la matrice de mes livres, presque malgré moi. Je me demande quelquefois si j’ai même jamais écrit sur autre chose. Comme si je ne m’étais jamais remis de ça : l’autre devenu inaccessible. Comme si ça occupait tout l’espace mental.

Note : 4 sur 5.

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