Oyana

Eric Plamondon

Le Livre de Poche / 2021 / 168 pages

Elle a fait de son existence une digue pour retenir le passé. Jusqu’à la rupture. Elle est née au pays Basque et a vieilli à Montréal. Un soir de mai 2018, le hasard la ramène brutalement en arrière. Sans savoir encore jusqu’où les mots la mèneront, elle écrit à l’homme de sa vie pour tenter de s’expliquer et qu’il puisse comprendre. Il y a des choix qui changent des vies. Certains, plus définitivement que d’autres. Elle n’a que deux certitudes : elle s’appelle Oyana et l’ETA n’existe plus.

Il ne m’a fallu que quelques heures pour venir à bout de cette petite bombe littéraire. Si comme moi vous aimez les récits puissants, emprunts d’histoire et d’une culture forte, je vous assure qu’une fois votre lecture lancée, rien ne vous arrêtera.  

J’ai découvert le destin d’une femme hors norme, poussée par l’urgence de livrer des années de silence à travers une confession qu’elle extirpe d’elle à force de courage et d’abnégation. À la recherche d’une paix intérieure qu’elle croit encore possible, malgré un parcours semé de mensonges et de non-dits. Un parcours de vie qui a pris un jour un virage à 180 degrés, donnant ainsi à son destin un voie à sens unique.   

Ce destin c’est celui d’Oyana, jeune basque née au sein d’une famille militante mais dont elle ne sait pas les combats. Jusqu’au jour où ce sang qui coule dans ses veines lui rappellera au détour d’un pâté de maison qu’elle ne peut pas échapper à ce qui fait d’elle ce qu’elle est. Puis les choix, qui n’en sont pas vraiment car ils s’imposent, les décisions nécessaires, la fuite, se sauver malgré tout, et survivre loin, en gardant au fond cette bombe qui n’a pas encore vraiment explosé.

Chaque fois qu’un corps tombe, il tombe inutilement. Il tombe de s’être trouvé dans un camp. Et les corps tombent parce que ceux qui les font tomber ont déjà perdu. Ils n’ont plus que leurs armes pour exister. Outil des faibles et de leur bêtise. Se regrouper et s’entre-tuer. Victimes et bourreaux à ajouter aux victimes et bourreaux. Des clans qui n’existent qu’en se dressant les uns contre les autres. Soldats troupes armées prisonniers pour tracer la ligne d’une frontière un peu plus à gauche ou un plus à droite. Kalachs tanks avions de chasse pour prier à genoux vers Rome, la tête au sol vers la Mecque, les mains en l’air vers ailleurs. Tas de chairs pour la prochaine catastrophe. Nous sommes des milliards et plus personne hors d’atteinte. Nulle part où aller sinon en soi.

Le rythme du récit parvient à nous tenir en haleine, entre souvenirs, flash-backs, déclarations teintées d’aveux, explications historico-politiques… tout est extrêmement bien ficelé et l’écriture sobre de l’auteur s’imbrique parfaitement avec son sujet.  

Même si j’avais quelques vagues notions de l’histoire basque et espagnole, j’ai appris énormément de choses grâce à ce roman, qui m’ont bouleversée. J’ai été touchée par cette femme et son parcours qui nous montre à quel point on peut, au gré des événements, des révélations et des aléas de la vie, faire certains choix qu’on aurait jamais pensé possibles et qui scellent notre destin.  

Merci infiniment @livredepoche pour cette envoi qui m’a touchée en plein cœur.  

Il y a des moments dans la vie où la question du choix ne se pose pas. On ne choisit pas: on agit.

Note : 4 sur 5.

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