L’été où tout a fondu

Tiffany McDaniel

Editions Gallmeister / 2022 / 480 pages

Porté par une écriture incandescente, L’Été où tout a fondu raconte la quête d’une innocence perdue et vient confirmer le talent exceptionnel d’une romancière à l’imaginaire flamboyant.

Breathed, Ohio, été 1984. Les mois les plus brûlants qu’aura connu cette petite ville. Brûlants parce que des événements étranges et terribles arrivent aux habitants, brûlants parce qu’une vague de chaleur s’abat sur la ville. Est-ce une conséquence de l’arrivée de ce jeune garçon noir en salopette élimée? Il n’arrive pas par hasard. Il répond à une invitation. Celle du procureur Autopsy Bliss, le père de cet autre jeune garçon, celui qui a décidé de nous raconter cette histoire. Son histoire. Celle qui l’amènera de l’enfance à l’âge adulte, celle de cet été qui changera à jamais le cours de son existence.  

Une invitation disais-je. Parue dans le journal local, elle est sans équivoque : le diable est prié de rendre visite au procureur Bliss, dont les questionnements entre le bien et le mal se bousculent. Ce sont ces questions qui sont traitées dans ce livre. Que sommes nous face au mal, à son incarnation lorsque nous décidons de le pointer du doigt? Sommes nous encore capables de discernement et de se détacher de ses convictions profondes? Pouvons-nous faire preuve de tolérance face à l’inimaginable?  

La chaleur est arrivée avec le diable. C’était l’été 1984. Le diable avait bien été invité, mais pas la chaleur. On aurait pourtant dû s’y attendre. Après tout, la fournaise n’est-elle pas un attribut du diable ? L’un ne va pas sans l’autre. Cette chaleur n’a pas seulement fait fondre des réalités tangibles, telle que la glace, le chocolat ou les popsicles. Elle a aussi fait fondre des choses abstraites. La peur, la foi, la colère, ainsi que les repères les plus fiables du sens commun. Elle a aussi fait fondre des vies, les privant d’un avenir, enseveli sous les pelletées de terre du fossoyeur.

Quelle impatience j’avais de relire Tiffany McDaniel après cet immense et intense coup de cœur qu’avait été Betty il y a deux ans. Retrouver sa manière de nous gonfler de sentiments si forts qu’on tourne les pages en tremblant, sa façon d’utiliser les mots avec précision et poésie, ses personnages poignants… et je dois dire que je ressors de ma lecture avec beaucoup d’émotion.  

J’avoue tout de même avoir eu de la peine à prendre le train en marche… la première centaine de pages m’a souvent laissée perplexe, les allers retours dans la vie du jeune, puis vieux, Fielding me faisant un peu perdre le fil. Mais j’ai ensuite compris la démarche de l’autrice et j’ai embarqué pour la destination qu’elle voulait me faire prendre. Ce n’est donc pas le coup de foudre de Betty, mais Tiffany McDaniel m’a encore une fois bouleversée par son regard sur les femmes et les hommes et c’est ce que je veux retenir de ce roman.

À en croire les apparences, il n’était toujours qu’un garçon comme les autres. De mon âge, à peu près, mais cette tranquillité solennelle qu’il affichait me faisait penser que dans son âme, il était âgé. Un garçon qui, dans sa boîte de crayons de couleurs, avait dû utiliser le noir plus que tous les autres.

Note : 3.5 sur 5.

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